Par Ghonda Nounga
La grande faillite des intellectuels africains au sujet de la Côte d’Ivoire provient de ce qu’ils n’ont pas su (ou pu ?) réajuster leurs schèmes d’analyses à la nouvelle géopolitique mondiale subséquente à la chute du stalinisme en URSS. Ces intellectuels se croient encore en pleine guerre froide. Et pourtant, l’ingénu de Voltaire, qui vit et survit dans les élobis de nos quartiers, a quitté le manichéisme de la guerre froide depuis belle lurette. Mais nos Jean-Paul Sartre locaux (ou diasporés) s’y complaisent encore, se soutenant les uns les autres dans un chorus d’idées branlantes.
Or l’impérialisme lui-même s’est réajusté après la chute de l’URSS ! Dans sa quête d’un nouvel ennemi à brandir pour justifier ses actes de prédation, il s’est tourné vers ses propres fabrications antérieures : les talibans. Et ces talibans ne sont en réalité qu’une maigre poignée de gens dont Washington et ses amis pourraient se débarrasser en un tournemain. Mais alors, quel autre justificatif auraient-ils alors pour leurs perpétuelles guerres de rapine ?
Par ailleurs, et le plus sérieusement du monde, leurs idéologues (et quelques dirigeants états-uniens) ont envisagé une « guerre des civilisations » contre les pays musulmans. L’impérialisme, nous l’a dit Lénine il y a belle lurette, a besoin de la guerre comme l’organisme animal a besoin de sang.
Avec le soulèvement des peuples arabes, l’impérialisme, pour ne pas être pris à défaut comme nos intellectuels « progressistes », cherche à nouveau à se réadapter. Car, que peut ouvertement cet impérialisme contre des peuples qui, s’emparant de ses propres professions de foi universalistes pour la démocratie et les droits de l’homme, se dressent contre les dictatures dont cet impérialisme était le soutien inconditionnel ? Et l’on comprend qu’Obama, Sarkozy et leurs copains veuillent désormais prendre les devants pour éviter la radicalisation de ces révoltes.
Et que disent nos intellectuels demeurés face à ces nouveaux enjeux ? Dans le droit fil de leurs interprétations oiseuses de ce qui se passe en Côte d’Ivoire, ils inventent le mythe selon lequel ce sont Obama, Sarkhozy et leurs copains qui seraient derrières les révoltes arabes, déniant ainsi aux peuples la capacité de se révolter pour tenter de prendre leur destin en main. Drôle de posture intellectuelle quand on est Kamerunais et qu’on a connu (au moins par ouï-dire) la gigantesque épopée du peuple kamerunais sous la direction de l’UPC !
Pour ce qui est de la Côte d’Ivoire, quelle est sa place dans le schéma ci-dessus esquissé de manière sommaire ? Les choses sont d’une simplicité à faire pleurer : sous Houphouët comme sous Gbagbo, la Côte d’Ivoire a été et reste la « propriété » de la France, laquelle, dans une sorte de gentlemen’s agreement, autorise ses alliés impérialistes à y faire des affaires. Avec Ouattara, la situation ne sera certainement pas différente. Mais ici, l’avantage pour le peuple ivoirien et l’Afrique en général, c’est que la démocratisation de la vie politique et l’alternance constituent déjà en elles-mêmes un grand pas vers la conscientisation et la politisation des masses. Pour le comprendre, il ne suffit que d’imaginer le formidable souffle qui soulèvera le Kamerun quand Biya s’en ira, quel que soit par ailleurs son successeur !
Gbagbo aurait dû comprendre et mettre en pratique ce principe d’un forumiste kamerunais : gouverner pour le bien-être de son peuple, instaurer la démocratie de manière à ce que ce peuple soit le souverain maitre de son destin et qu’il puisse mettre et démettre ses dirigeants, c’est, quoiqu’on puisse en dire, gagner déjà une bataille contre l’impérialisme.
Mais Gbagbo ne pouvait le comprendre. Il était aussi anti-impérialiste que moi je suis pape.
Les dieux en soient remerciés, l’URSS staliniste est tombée. Sinon, en CI, nous aurions vu les Occidentaux soutenir Ouattara tandis que ladite URSS aurait soutenu l’usurpateur Gbgabo. Et la guerre aurait duré un siècle pour la plus grande satisfaction « anti-impérialiste » de ces étranges intellectuels que sont Calixte Beyala, Gaston Kelman et d’autres qui, s’ébrouant dans un avatar de négritude (à rebours), expulsent joyeusement les Nasser du panafricanisme en le confondant allègrement avec le « pan-négrisme. »
Qu’est-ce qu’il serait utile, pour les temps à venir, de passer en revue l’illogisme et la rhétorique des bas-fonds qui ont accompagné la célébration béate du « panafricanisme » et de l’« anti-impérialisme » de l’imposteur Gbagbo ! Parce que l’histoire ne prend pas de congés ; parce qu'elle ne prend pas de vacances ; et parce que nous devons rester lucides et vigilants au possible.
Cher Ghonda,
ReplyDeleteJe salue la naissance de cet espace de rencontres. Pierre angulaire, parmi d'autres, de l'immense fortification à venir : un monde plus chaleureux pour tous. Que nos enfants en tout cas ne manquent de rien qui se transmet de pères en enfants.
L'histoire ne prend pas de congés,dis-tu. J'aimerais un jour avoir ton sentiment à propos de cette impression qui me taraude : l'école du Cameroun est-elle indifférente à la qualité des intellectuels camerounais ? Je voudrais ici te titiler un peu, Ghonda : as-tu essayé de recenser qui a dit quoi lors de cette crise ? Mon sentiment étant que plus nombreuix sont allés secourir le nationalisme, le panafricanisme de verroterie de Gbagbo.
Bien sûr, on peut douter du Panafricanisme de GBAGBO, Mais avant de prendre les autres pour des crétins, avez vous suffisamment analysé le résultat des urnes.
ReplyDeleteJean Michel Nintcheu avait justement déclaré que les camerounais n'étaient pas tant pour GBAGBO que contre la France.
La justesse du choix de la rue camerounaise se vérifie aujourd'hui avec l'entrée "officielle" de la France dans le conflit ivoirien.
De grâce, ne perdons jamais de vue l'ennemi. Pour l'heure ce n'est pas GBAGBO !!
Respectons la règle suivante :
"le ligne sale se lave en famille", pour peu que nous soyons de la même famille.
Même brillamment écrite, dite ou clamée, une bêtise est une bêtise.
Question pour les révolutionnaires?
Votre posture est-elle bénéfique pour la "lutte" ?
Fraternellement
cher Ngonda !
ReplyDeleteVoici le point de vue d'un journal burkinabè !
Que GBAGBO ne soit ni panafricaniste, ni anti-impéraliste, n'empêche qu'en ce moment la Côte d'ivoire soit attaquée par des impérialistes, anti-panafricanistes.
suivre le lien :
http://www.sanfinna.com/avuedemonde1.htm
Mr NGONDA,
ReplyDeleteje suis surpris et choqué par votre naiveté stratégique...Du reste vous ne vous démarquez pas de cet intellectualisme gratuit et stéril sans viser stratégique qui caractérise un certain type d'africains autoproclamés démocrates...
Algore aux USA a perdu une élection dans des conditions douteuses, ce n'est pas pour autant qu'il a fait la guerre ou qu'il en a appelé aux tiers...ce qui l'animait c'était l'amour de son pays et non la démocratie...jusqu'où seriez vs pret à accepter que l'on tue les africains pour de la démocratie?
Vous perdez de vue que les Etats n'agissent pas gratuitement...vous croyrz naivement que c'est pour éviter des critiques qu'obama et sarkozy agissent en libye ou en côte d'ivoire... pourqoi ne le font-ils pas au yemen, en syrie ou au bharein? Parce que les enjeux stratégiques ne l'imposent pas. question:
Quels sont les enjeux stratégiques qui sous-tendent la posture supposée intellectuelle que vous adoptez?
We know France is a historically criminal nation, up to its neck in blood and gore, from its vile war against freedom fighters in Haiti, Algeria … but what is true for France it is also for the UK, Germany, Spain, USA, China, Russia. It's how nations are formed, they will use any reasons. For the imperialists of old it was to civilise the natives and save them from savage barbarity. For the new imperialists it will be Human rights and civilians protections….
ReplyDeleteI have a great understanding of the gravity of war. (This deep understanding and unwillingness to support war stemmed from having some of my family members experiences of war and occupation on their soil in the recent past...) but Time was running out for an amicably negotiated settlement the guy had four months..Stalemate was not an option...
What’s going in Ivoiry Coast is it a political power struggle? Is it ideology? Is it Imperialism?
Is it Francafrique? Is it about Democracy? Human rights?
Picturing the Ivorian conflict only as Imperialist or Francafrique is over-simplistic and knee-jerk analyses of France's role, both past and present, in Africa. That said, I don't kid myself, France acts were it has an interest. We've seen countless examples in recent times, whether in Niger, Gabon or Libya. Or, perhaps worse, it blocks action where it has interests too, such as in Tunisia or Rwanda, but Present Françafrique policy now consists of no more than frantically trying to decide how to counter the massive economic competition France is currently facing from the rest of the world in what it used to call its "pré-carré.". France has long supported corrupt regimes in Africa, especially when they buy arms or give favourable oil contracts to Total.
But as I said earlier, Ivorian conflict is deeper that imperialism or Francafrique but These facts don't matter to those who criticise France for political reasons. They've already made up their mind about any form of Western military operation, usually because they have an agenda (be it staunchly anti-Western, cultural relativism, isolationist far right, or some morally bankrupt strain of Panafricanists) or have subscribed to conspiracy theories they've read on the internet>> more to follow
These critics will of course never have to take the decision to intervene militarily in a war zone in which civilians are dying. In situations such as Libya or the Ivory Coast it's the West that has the capability to intervene, so it's Western leaders that have to make the decision once the UN has called for action. If these perennial critics did have the power, and were asked by the UN "People are dying in the Ivory Coast, can you please help?", presumably they'd say "No", and go to bed safe in the knowledge that their "anti-imperialist" credentials remain immaculate. If a bloodbath ensued it would somehow be blamed on the West anyway.
ReplyDeleteIt is neither always right to intervene, nor always wrong. Many on here, both above and below the line, believe the latter.
Laurent Gbagbo has justified his actions in terms of the defence of national sovereignty, brandishing the spectre of the country falling prey to foreign influences. This is a diversionary tactic. His political opponents are just as patriotic and just as concerned with developing the national economy in a more equal partnership with Western (or other) powers. Whatever its claims, the Gbagbo regime has hardly turned its back on the "predatory foreigners" it purports to ward off. Over the past ten years, it has depended on extensive politico-commercial networks in France and elsewhere. Not to mention the recourse to Liberian and other international mercenaries for controlling the Ivorian population.
more to follow
To the extent that there is any real ideological difference between the two camps.
ReplyDeleteThe RHDP centres on their conception of citizenship. The Gbagbo regime promotes an ethno-nationalist vision: only members of indigenous ethnic groups from the south of Côte d'Ivoire may claim a fully legitimate, or ‘natural', right to civic participation - a citizenship ‘by blood'. In this conception, electors from the northern regions, assimilated to ‘foreigners', are relegated to the status of second-class citizens. Annulling the votes of districts in the north and the centre of the country is thus consistent with this logic. The opposition claims a republican conception of citizenship, founded on the principal of equality and according civic rights to all those born in the Côte d'Ivoire, a far remove from the ‘divine right' claimed by Gbagbo
Therefore ideology is undoubtedly not the key to understanding the ongoing crisis. The Gbagbo mafia is struggling first and foremost for power; for an exclusive hold on power, for the very enjoyment of power, with all its attendant material benefits, on the other hand Ouattara is also desperate to access power, the difference being he has the people mandate….
I do not share the view that Gbagbo`s supporters will hold a grudge although it is true that he has a hard core of supporters who are just a vociferous and agitated minority who monopolize the state media they have hijacked; We should not overestimate their numbers, the fact is nobody is fighting for him apart from that hard core... does it mean there is no risk that the situation will escalate into civil war …only time will tell but as someone who have been in that country, I must insist that there is no evidence for any primal hatred between supposedly rival ethnic groups, nor for that matter between local populations and foreigners, between northerners and southerners, much less between Muslims and Christians. This is not to deny the existence of sharp, long-lasting tensions, particularly over access to land. However, the interplay of intersecting interests has generally allowed Ivoirian to implement negotiated solutions to such recurrent disputes. Moreover, Côte d'Ivoire, a country with a long history of mixing, remains a trans-ethnic, cosmopolitan, multi-religious "melting pot." In any "civil" war, who would fight against whom? The answer is anything but obvious.
One of Gbagbo strategy was to stir fears, resentment, and promise Armageddon or apocalypse after him, but I trust the resilience of the overwhelming majority of Ivoirian on all sides of the political spectrum to confront the crisis without resorting to violence
elparino,
ReplyDeleteVotre discours est faux et vous devriez vous placez dans une des catégories que vous avez construites pour classifier les individus en fonction de leur prise de position sur le conflit en Côte d'Ivoire et l'agression que le pays a subit de la part du conseil de sécurité de l'ONU et de la France.
Ne tentez pas de ré-écrire l'histoire.
Je ne m'efforcerai pas non plus outre mesure de vous prouvez que vous poursuivez des objectifs inavoués.
Mr Ghonda Nounga
ReplyDeleteVous faites une mauvaise lecture du «printemps Arabe»
La capacité d'un peuple à se mobiliser ou se révolter est une chose
La capacité d'un peuple, suite à un mouvement de révolte, à renverser un gouvernement en est une autre.
Que les gouvernements occidentaux aient décidé d'ordonner à ses «créatures» de Tunisie et d'Égypte de ne pas noyer dans le sang les révoltes populaires est une chose.
Prétendre que l'occident ait organisé les révoltes populaires en est une autre.
Demandez-vous si l'intellectuel cocasse ce n'est pas vous!
Une conversation rapportée entre Moubarak et Barack Obama fait été de ce que Moubarack suppliait Obama de lui donner une semaine pour «ramener le calme».
La réponse d'Obama: NON!
Que cela vous plaise ou non, c'est la réalité.
erratum
ReplyDeleteune conversation rapportée.. fait état de ce que...